(Un poème de Pierre Schneider)
Le goût de ta langue
Quatre cent ans de francitude
en Québec à défricher
vaincus, conquis
colons devenus colonisés
fiers de nos terres givrées
de nos montagnes vertes d’espoir
de notre grand fleuve
en long en large et en couleurs
malgré les coups et les attaques
nous qui n’avons jamais flanché
J’ai le goût de ta langue
le goût de ta langue
le goût de ta langue
Elle porte en son sein généreux
ces sillons lentement labourés
de notre précieuse liberté
Depuis la France au Sénégal
j’aime le son de tes mots
Gabon Ghana
Haïti Rwanda
du Togo au Liban
bifurquant par l’Égypte
en route pour l’Équateur
mémoire de Gaughin
à Tahiti-la-jolie
belle comme une pucelle
sous le soleil des Seychelles
De la francité à la francitude
langue armée de l’ultime résistance
la phonie de ton verbe
fait vibrer toute ta poésie
Toi, ma douce, ma bien-aimée
toi dont j’aime tant et tant
le goût tantôt sucré tantôt salé
de ta langue que je déguste
avec si intense passion
Pierre Schneider
(tiré du recueil : La trahison comme mode de mort, Les Éditions du Québécois, 2011)
(Par France Bonneau)